On était prévenus, tous ceux qui y étaient déjà allés nous l’avaient dit. Mais quand même, c’est fou ce que le Chili et la Bolivie sont différents ! Nous avons pu nous en rendre compte pendant la semaine que nous y avons passée avec une très bonne amie Eugénie, venue passer quelques jours avec nous en Amérique latine.
Voici le récit de notre séjour et, à la fin de l’article, un lien vers quelques photos !
- Jour 1 / Arrivée à la Paz
La capitale la plus haute du monde est une immense cuvette. L’aéroport est sur les hauteurs de la ville, à 4900m, et de là on a une vue imprenable sur la fourmilière qu’est la Paz. Nous rejoignons le centre-ville, à 4600m, et découvrons quelques aspects de la vie quotidienne en Bolivie : les femmes vêtues de leur tenue traditionnelle (chapeau melon, jupe bouffante, vêtements colorés et bien souvent un bébé porté dans le dos avec un tissu large); des centaines de mini-bus et taxis qui sillonnent la ville, bien plus nombreux que les voitures particulières, et l’altitude qui rend la respiration difficile.
Nous visitons la superbe église saint-François (milieu du XVIIe), en plein centre de la ville : le lieu de tous les rendez-vous des habitants de la Paz. La nuit est maintenant tombée sur la ville, il ne nous reste plus qu’à rejoindre notre hôtel pour une première nuit bolivienne !
- Jour 2 / Ile du Soleil
Nous quittons la Paz dans un bus bolivien typique (= « je pars quand je suis plein » / « faire une marche arrière sur la voie d’en face puis un demi-tour sur une route de montagne, même pas peur ! ») pour rejoindre l’Ile du soleil via Copacabana. Avant d’atteindre Copacabana, nous coupons au plus court et traversons un bras du lac Titicaca sur une barge. Après 4h de route, nous arrivons donc sur la rive du lac Titicaca dans la ville qui a donné son nom à la célèbre plage brésilienne. De là nous prenons un bateau qui nous débarque sur l’Ile du Soleil, après 1h30 de navigation.
L’île est splendide ! A peine arrivés, nous entamons une marche de 3h qui nous fera traverser toute l’île du nord au sud, par les hauteurs. De là on a une vue magnifique sur le lac le plus haut du monde, avec la Cordillière des Andes en fond : majestueux ! Pendant notre randonnée, nous croisons une vingtaine de personnes seules (bien souvent des enfants) vêtues de la tenue traditionnelle bolivienne et revenant de la pâture avec leurs quelques moutons et/ou leurs ânes. Le mélange des touristes et de la population locale qui vit de l’élevage de 5 moutons est assez étonnant..!
Notre objectif était d’arriver sur les hauteurs de Yumani, au sud de l’île, pour y voir le coucher de soleil. L’altitude rendant la marche plus difficile, nous sommes arrivés un tout petit peu trop tard… Plusieurs personnes nous ont même fait un peu peur en nous demandant si nous avions prévu une lampe frontale, vu la distance qu’il nous restait à parcourir ! Tout est bien qui finit bien : nous sommes arrivés à notre hôtel aux dernières lueurs du jour. Nous nous rattraperons avec le lever du soleil sur le lac le lendemain ! Nous nous rattraperons avec le lever du soleil sur le lac le lendemain ! Dans l’hôtel (4€ la nuit par personne, record à battre !), la plupart des gens parlent français.
- Jour 3 / Copacabana
Nous nous réveillons tôt pour admirer le lever du soleil sur le lac : quel spectacle ! Après un petit-déjeuner de roi, avec vue plongeante sur le lac (pour le prix d’un café en France), nous reprenons le bateau pour revenir à Copacabana. Cette ville, à deux pas de la frontière péruvienne, a des faux-airs de station balnéaire. Nous y faisons un chemin de croix très connu, véritable calvaire au vu de l’altitude ! Mais le jeu en vaut la chandelle : de là-haut on a une vue splendide sur la ville et le lac ! En haut, on peut acheter des rêves en miniature. Par exemple, si mon souhait est d’avoir un cabinet de dentiste, de posséder une maison à deux étages ou d’avoir une Porsche, je peux acheter chacune de ces choses en miniature (il y a vraiment de tout : maison, épicerie, voitures, immeubles…) en espérant que la Vierge de Copacabana me les accordera. Comme on le verra ensuite, la frontière entre la foi et la superstition n’est pas toujours très nette en Bolivie..!
Nous découvrons également la magnifique basilique XVIe dédiée à Notre-Dame de Copacabana, la patronne de la Bolivie. A l’intérieur est conservée la statue originale de ND de Copacabana, sculptée par un indien en 1580.
- Jour 4 / la Paz
Nous partons tôt dans la matinée pour rejoindre la Paz. Comme tous les moyens de transport que nous empruntons pendant notre séjour, le bus est un joyeux mélange de boliviens typiques mâchant de la coca à longueur de journée, de touristes francophones, d’Américains parlant (trop) fort, etc. Nous reprenons la route empruntée quelques jours plus tôt, longeons à nouveau le lac Titicaca, traversons sur une barge, passons au milieu de la campagne bolivienne, arrivons sur les hauts de la Paz et descendons dans le centre-ville de la Paz.
Nous nous attablons dans un restaurant à touristes dans la rue Sagarnaga, siège de toutes les agences qui proposent la descente de la « Route de la mort » à vélo, que nous ne pourrons pas faire, faute de temps. De là, nous prévoyons le plan de bataille de l’après-midi : visite du musée de la Coca et cathédrale.
Le musée de la Coca nous permet de mieux comprendre le rôle joué par cette plante dans la culture bolivienne. Très différente de la cocaïne (on peut la consommer sans aucun effet secondaire et pour produire 1g de cocaïne il faut 1kg de coca) elle est véritablement omniprésente en Bolivie, car elle aide à supporter l’altitude et la pénibilité du travail. Le taux de consommation, ou plutôt de mastication puisqu’elle est utilisée comme un chewing-gum, de la coca est impressionnant : d’après une étude publiée en 1986 plus de 85% des boliviens en consomment fréquemment. Il n’en reste pas moins que les effets à long terme de la consommation de la coca restent assez peu connus, Howard Fonda dira dans les années 50 que sa consommation est responsable du « retard mental et de la pauvreté des peuples andins » et en 1961 sa consommation a été déconseillée par l’ONU parce qu’assimilée à la toxicomanie… D’ailleurs le musée de la coca a été créé comme un moyen de prévention. Ah, oui, à l’origine il y avait bien de la coca dans le Coca-Cola, mais plus maintenant ! Pour plus d’infos sur la coca, cliquez ici.
Nous filons ensuite vers la très belle cathédrale de la Paz, située sur la place Murillo où se trouvent également le palais présidentiel et le siège du gouvernement. L’inénarrable président Evo Morales, qui a modifié la constitution pour changer le nom de « République de Bolivie » en « Etat plurinational de Bolivie » et a fait reconnaître 37 langues officielles dans le pays, Evo Morales, donc a fait installer une horloge « inversée » afin de retrouver « l’identité des peuples du Sud » chez qui le soleil tourne « vers la gauche »..!
- Jour 5 / Potosi
A 20h, nous rejoignons la gare routière de la Paz pour notre première nuit en bus ! En Bolivie le bus est le moyen de transport par excellence et on peut choisir des bus de différents conforts. Nous avons pris un bus avec des sièges totalement inclinables, encore plus confortables que l’avion ! Après un voyage mouvementé (le pilote s’entraînait visiblement pour le Paris-Dakar et il semble avoir eu du mal à trouver le bouton « off » du chauffage : on a bien cru qu’on allait cuire !) nous arrivons à Potosi à 6h30 du matin. Nous cherchons en vain un café ouvert avant 8h… Nous toquons donc vers 7h30 chez notre amie Charlotte, avec qui nous avons fait la formation au départ avec la DCC. Nous partageons avec elle un bon petit-déjeuner avant de partir visiter la ville, et en particulier le Musée de la monnaie.
En effet, Potosi est surtout connu pour l’énorme mine d’argent qui domine la ville. On estime que cette mine, exploitée depuis le XVIe, a produit la moitié de l’argent exploité dans le monde. A la fin du XVIe, Potosi est l’une des vingt plus grandes villes du monde, elle reçoit le titre de ville impériale par Charles Quint (seule ville d’Amérique du Sud à porter ce titre) et devient le « centre économique du monde ». L’actuel musée de la monnaie a été longtemps le lieu de créations des pièces, à partir de l’argent extrait dans la mine. Triste ironie de l’Histoire : si la mine est encore exploitée, aujourd’hui les pièces boliviennes sont frappées en France et en Allemagne et la Bolivie est le pays le plus pauvre d’Amérique du Sud…
L’après-midi, nous prenons le chemin de la mine ! En effet la mine est encore exploitée et de nombreuses agences proposent de la visiter et d’échanger avec des mineurs. Nous avons donc enfilé des bottes, un masque et une lampe frontale et sommes allés à la découverte du quotidien des mineurs. C’est très impressionnant de suivre les rails sur lesquels roulent les chariots qui extraient l’argent, de se faufiler, se pencher, se relever en fonction de l’élargissement ou du rétrécissement du tunnel… Et de croiser des gens qui travaillent là « pour de vrai » ! Quelle vie ! D’autant plus que nous savons que des enfants y travaillent également. Officiellement le travail des mineurs de moins de 12 ans est interdit (même si c’est un sujet actuellement débattu avec les syndicats), mais plusieurs sources parlent de 800 000 enfants qui travaillent dans le pays… On nous a ainsi raconté l’histoire d’un enfant de 9 ans dont le père est décédé il y a peu et qui travaille depuis à la mine pour nourrir sa famille.
Il est convenu que les touristes apportent des « cadeaux » aux mineurs : boissons, coca (la seule nourriture des mineurs pendant leur travail sous terre, consommée à longueur de journée), etc. En échange de quoi on échange un peu avec eux. Nous découvrons un aspect assez étonnant de la vie dans la mine : beaucoup de superstitions rythment le quotidien des mineurs. Parmi celles-ci, les « offrandes au Tio de la mine », le tio étant le démon. Autant vous dire qu’on n’a pas suivi la file des touristes qui déposaient leur petit cadeau aux pieds de la représentation du démon !
En effet, la Bolivie est très marquée par le syncrétisme. La foi catholique et les religions traditionnelles se mélangent allègrement dans un méli-mélo superstitieux. Ce qui donne des mélanges détonnants, comme cette explication dans la mine : « Dieu vit dans le ciel, n’est-ce pas ? Il est donc logique que ce soit le diable, qui vit sous la terre, soit le dieu de la mine, ». Ah, d’accord..!
- Jour 6 / Le chemin des Incas
Juste après avoir visité la mine, nous partons avec Charlotte vers Sucre où nous allons passer deux jours.
Le premier jour nous retrouvons Maritza, une amie de Charlotte qui nous emmène découvrir le Chemin des Incas. C’est un très beau chemin de pierre, bien souvent à flanc de montagne, qui nous fait traverser des paysages splendides qui ressemblent (de loin) aux puys auvergnats, avec infiniment plus de couleurs. Ce chemin a été édifié par les Incas avant la colonisation espagnole et a été emprunté pendant des décennies et est encore utilisé aujourd’hui par les enfants des villages voisins pour aller à l’école. Ce chemin débute par une chapelle de Chitaquila, à 3650m et dévale pendant près de 5km jusqu’au petit village de Chanauca. Quelques photos en plus des nôtres pour se rendre compte de la beauté du lieu : clic.
Nous visitons un village Jalq’a (du nom de la population qui vit dans cette vallée au centre d’un gigantesque cratère) dans lequel une femme tisse de manière traditionnelle avec des outils plus que rustiques : il lui faut plus de 3 mois pour terminer son tissage constitué de multiples formes, animaux, silhouettes qu’elle réalise sans modèle ni dessin. C’est un travail incroyable !
Après notre journée de marche, nous revenons dans le centre-ville de Sucre pour déguster une crêpe préparée sur un bilic breton !!! Nous découvrons ensuite Sucre de nuit, une magnifique ville coloniale, très bien conservée.
- Jour 7 / Sucre
Après avoir eu un aperçu de Sucre la nuit, nous prenons le temps de la découvrir de jour. L’ancienne capitale de la Bolivie (et actuelle capitale constitutionnelle) a gardé un charme incroyable. Les nombreuses églises sont toutes aussi splendides les unes que les autres, la place centrale est lumineuse et bien aménagée. Les façades des nombreux bâtiments anciens sont claires et bien entretenues, il y a de beaux balcons sur la plupart des immeubles, les rues sont larges : on a l’impression de faire une cure de vieilles pierres qui nous manquent parfois depuis notre arrivée en Amérique du Sud !
Nous allons à la messe dans la belle église San Domingo où nous éprouvons (une fois de plus !) la grande joie d’être catholiques : perdus au fin-fond de l’Amérique du Sud, nous assistons à une très belle messe célébrée par un prêtre édifiant soutenus dans la prière par une superbe chorale. Dieu est bon !
L’après-midi se passe en déambulations dans le centre-ville, visite de la cathédrale (où Jean-Paul II est venu en 1987), vue panoramique sur la ville depuis un quartier dans les hauteurs, ayant abrité autrefois un couvent de franciscains. Nous nous cassons le nez sur la porte de la Casa de la Libertad où a été signée la Déclaration d’indépendance de la Bolivie en 1835, tant pis !
Enfin, nous regagnons la gare routière où nous nous mêlons à la foule compacte. En effet, en cette veille de retour de vacances scolaires chacun cherche le bus dans lequel il va passer bien souvent une dizaine d’heures avant de rentrer chez lui. En découvrant « notre » bus arriver dans la gare, nous rions en constatant qu’une vitre a été brisée et qu’elle a été « recollée » avec du scotch. Nous ne rions plus quand nous constatons qu’Eugénie a la place juste à côté de cette vitre. Nous sommes un peu rassurés en testant la solidité de la réparation de fortune mais préférons tout de même tendre une couverture pour éviter que des morceaux de verre ne tombent sur elle pendant la nuit. En effet, à chaque secousse (et il y en a eu beaucoup !) quelques éclats tombent sur les fauteuils..!
- Jour 8 / La Paz
Après une halte au milieu de nulle part en plein milieu de nuit (ah, les odeurs de friture à 3h du matin dans les étals de fortune de ce qui ressemble à une escale pour touristes), nous arrivons à la Paz vers 8h. Le temps de prendre un dernier petit-déjeuner bolivien, de faire quelques achats et nous traversons une bonne partie du centre-ville pour attraper l’un des bus qui part vers l’aéroport. Retour au Chili, qui nous paraît finalement tellement loin et différent de la Bolivie !
Pour voir plus de photos, cliquez ici !
Quelle verve dans la narration !
Merci de prendre tout ce temps pour relater ainsi les épisodes de votre noble aventure. Olivier, tu es superbe en mineur. OK, c’était facile ! Je vous embrasse. Bertrand
Merci Bertrand ! Comment vas tu, à J- plus beaucoup ? Tu as relu ton Petit précis pour l’occasion???
Haha que de bon souvenirs!
Et j’aime le style
Et vive vos liens hypertextes.
En cette période de fêtes patriotiques, bons barbecue à gogo. Étonnamment, ici en France il fait beau et on en fait aussi. mais avec des Knackies, c’est bcp moins bon!
Timothée
Merci Tim’, tes conseils de voyage nous ont été précieux!
On mangera une empanada de pino à votre santé, en regardant nos voisins danser la cueca !
On vous embrasse !